Les larmes du spectateur.
Pour ma première production ici, j'avais prévu un texte long, épique et déchirant sur la fin de la série Urgences. Tellement long et déchirant que Méli Mélo et Anakin en ont déjà largement parlé et bien mieux que moi. ..
Telle la cavalerie américaine, j'arrive après la bataille.
Et quelle bataille ! Cette saison, Urgences s'est fendu de prises de position qui ne lui ressemblent guère, principalement sur la guerre en Irak et le Darfour. Est-ce pour cela que la chaîne officielle numéro Deux nous l'a expédiée en troisième partie de soirée ? Ou plutôt pour privilégier sa gentillette copie, Equipe médicale d'urgence (en prime le mercredi soir), qui est à ma série fétiche ce que le fromage allégé est au camembert fondant. Bref, pas de quoi se faire défibriller de bonheur. Sinon, pour le reste, c'est comme chaque année, ça finit en eau de boudin avec son lot de suspense intenable (Jerry va-t-il mouriiiiiiiiiir ?) et de décès (après Mark Green, Lucy Knight, Robert Romano, cette saison ze ouineur is… Michael Galant !!!). Histoire de bien précipiter le mort râle dans les chaussettes en attendant l'an prochain…
Heureusement, TFBouigues a trouvé le moyen imparable de nous le remonter, ce moral.
Comment ? En diffusant, dimanche soir prochain - après la touchante transcription par Jeunet de l'excellent roman de Japrisot Un long dimanche de fiançailles – en lâchant donc en deuxième partie de soirée, disais-je, une perle. Voui, voui, voui… UNE PERLE… de propagande états-unienne. La chose s'intitule Les larmes du soleil, avec l'imperturbable, l'indispensable, l'indéboulonnable Bruce Willis.
Je préfère vous le dire tout de go-rille (dans la brume), je ne vous raconterai pas l'histoire dans les grandes lignes quand une seule suffit : c'est l'histoire d'un commando américain super balèze qui sauve un groupe de pauvres Nigériens (qui se demandent un peu ce qu'ils fichent dans cette galère) et zigouille tous les méchants du coin, comme ça, en passant.
On devrait toujours se méfier d'un film réalisé par un mec qui s'appelle Antoine Fuqua. De là à dire qu'on se fait royalement ch… devant Les larmes du soleil, ce serait inexact car les Ricains ont le sens du spectacle, des images fortes et du suspense. Vu au second degré, ce film est même tout-à-fait passionnant. Mais il porte en lui une tare énooooooooorme autant qu'impardonnable : en effet, je peux passer sur les invraisemblances du scénario, je peux supporter le manichéisme primaire, je peux renoncer à comprendre pourquoi Dieu se retrouve à toutes les sauces, parachuté derrière chaque tronc d'arbre de l'Afrique, je peux excuser la facilité de la bande originale (allez hop, un petit mélange de Gladiator et Pearl Harbor, ça ne coûte rien), je peux tolérer l'absence abyssale de profondeur chez les personnages, je peux même fermer les yeux sur les pompages éhontés faits au film Il faut sauver le soldat Ryan… mais jamais, non JAMAIS je ne pardonnerai à ces abrutis de producteurs d'avoir jeté la SUBLIME Monica Bellucci dans ce bourbier ! On dirait une rose dans un champ de navets. Faute de goût lamentable. On a envie de traverser l'écran, de botter l'arrière-train de môssieur Ouillis, de se planter devant Monica, de se fondre dans ses yeux brûlants et de lui dire : "Viens, laisse ces nuls, on s'en va !"
Mais non, elle est courageuse, Monica, elle reste et supporte dignement toutes ces âneries. A la fin du calvaire, ce n'est pas le soleil qui verse des larmes… Lui, il a tout simplement décidé d'aller se coucher.
Courage tout le monde, l'intérêt de ce dimanche soir risque d'être parfaitement asystolique…
Au lieu de ça, ces messieurs responsables de la programmation des chaînes pourraient nous rediffuser Mon oncle Benjamin, avec la charmante Claude Jade, qui vient de nous quitter.
Par Cinéphage Fogg.
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